8.28.2013

Une insoumission /3





























Et parfois une chute véritable. 

C'est un dessin de Michel Ange. 
Des chevaux, un homme, ils tombent. 
Longs corps tordus, renversés à l'équité du ciel et de la terre — au centre de la feuille — à l'endroit du temps irréversible. 
Phaeton, le char, les chevaux emmêlés dans la débâcle, l'écroulement. 

Comment font les corps dans le vide quand ils ont le ciel à traverser ? Avec quelles torsions inversées ? 

Corps qui ne sont plus retenus. Corps impossibles.


La suite ne nous intéresse pas. 





image "La chute de Phaeton", Michel Ange vers 1530

8.27.2013

Une insoumission /2
























Un peintre, il se jette dans le vide. C'est un envol, dit-il.





image : Yves Klein "Le saut dans le vide", 1960

8.26.2013

Une insoumission /1

















Un homme, il est devant des barrières. 
Il n'attend pas. 
Il ne se déplace pas. 
Il est en l'air, au-dessus du sol. 
Il flotte. 
C'est une photographie de Denis Darzacq. Ça n'est pas une chute, c'est un moment d'apesanteur. Une façon d'aller contre le poids, une insoumission.
Il est seul dans l'image, saisi en plein saut, arrêté sur ce soulèvement. La ville pour fond. La suite ne nous intéresse pas.




image : ©Denis Darzacq "La Chute, n°14" 2005-06

8.23.2013

En écoutant n'écoutant pas

























Il faudra recommencer. Avec un on, un nous. Nouer. 
Apprendre les nœuds, les attaches. 
On verra bien par où attraper la lumière, comment tourner autour. 
Avec les planches qu'on a encore entre les bras, les bastaings, les chambranles. 
Est-ce qu'on peut laisser le dessous dessous pour cette fois ?
Est-ce qu'on peut se passer d'aller creuser dans les mémoires, les vestiges ? 
Juste, installer des planchers flottants et puis tendre des fils. Et tirer un rideau. 
S'asseoir.


En écoutant n'écoutant pas la mer.
En regardant ne voyant pas les gens qui sont devant.

8.01.2013

Est-ce la mer qui est devant ?




Ils viennent du Kosovo, d'Afghanistan, d'Irak, d'Erythrée, d'Etiopie. 

Pour franchir le passage de Calais, ils viennent de Somalie ou d'Iran, patientent dans des taillis, des sous-bois. Des talus. Des parkings. Empruntent des chemins à couvert qu'ils appellent pistes, tracks, avec cette démarche silencieuse et lasse qu'ils ont en commun. 
Il faut beaucoup de patience. 
Dans l'exil tout rappelle l'attente.

Cette ville, elle a complètement dépassé ses limites. Elle s'est étendue en longues filoches. Pistes en écharpes enroulées sur elles-mêmes, cousues, déchirées. Loques. Lambeaux. Pistes distendues, où ils marchent comme derrière un rêve qu'ils repoussent plus loin. Longues pistes du rêve. Longues suites de pas les uns derrière les autres, avec des piétinements aux frontières. 
On est dans la forêt.
On bricole des échelles en bois dans la forêt.
La mer devant est fermée.
La barrière se poursuit jusque dans la mer.
On ne sait plus bien où l'on est, depuis combien de temps on est partis. On se rappelle d'où l'on vient. On vient chercher la vie qui est devant.

Qu'est ce qu'on trouve ? 
Entre les îles et le continent, dans les détroits, les passages, les canaux. Tout le long de la mer Méditerranée. S'il faut grimper. S'il faut sauter. S'il faut courir. S'il faut ramer.

Est-ce la mer qui est devant ?