6.29.2023

Et donc, ils sont revenus


Jeudi 29 juin

Et donc, ils sont revenus, les petits poèmes flottants, ces centons écrits à partir du florilège des ( ) de jour. En les proposant pour traduction à Deniz Dagdelen ("Le Dactylo Méditerranéen") ils me sont revenus à l’esprit. Non parce que je les avais oubliés, mais parce que j'ai repris le fil de ces poèmes-trouvés (exactement comme on dirait des enfants trouvés) — poèmes agencés-recueillis, adressés à distance, depuis un ailleurs vers un ailleurs. J'ai nommé la 1ère série, écrite pendant le confinement, Lettres océanes, en clin d’œil à Cendrars : "la lettre-océan n’a pas été inventée pour faire de la poésie mais quand on voyage, quand on commerce, quand on est à bord, quand on envoie des lettres-océan, on fait de la poésie" (B. Cendrars in Feuilles de route). J'en lirai une partie au festival des poésies contemporaines "Et Dire Et Ouïssance", ce vendredi, à Brocéliande. J'en poursuis l'écriture à partir du même dispositif, de coupes et d'agencements de citations, avec ce fil d’ariane qui est une adresse par-delà le temps et l’espace. Ces petites formes sont des respirations en accompagnement de projets plus lents et plus volumineux, de projets associés à des territoires. Et puisque deux chatons juste arrivés nous forcent à garder les portes closes sur le jardin, je nous fais lecture de poésie, Benoit Casas (Combine) et Emmanuel Laugier (Chant tacite), l’un puis l’autre en fin d'après-midi. 



6.22.2023

Pause


Lundi 19 juin

Pause après plusieurs fins de semaines à Paris. Des répétitions, des retrouvailles, un marché de la poésie — un marché effleuré, quelques rencontres choisies. De retour, le secours du jardin. Je vais et viens du dedans au dehors en traînant mes questions : comment prendre les choses une par une ? Trouver du temps pour penser ? Faire de la place ? Une sensation de vide ou de trop plein, ce qui revient au même. J’ai compté ce week-end les Orchis (pyramidaliset les Ophrys abeille (apifera) particulièrement abondantes cette année dans les zones non tondues du jardin — plus de 200 pieds de chaque espèce alors qu’on dit l’Ophrys rare en Bretagne. Il suffit certainement d’arrêter de vouloir tout ordonner. Je me suis endormie dehors plusieurs fois en lisant Le Mont Analogue, comme si la pause elle-même produisait l'épuisement. Sous le figuier, un air chaud et frais, mal mélangé, a produit sur moi par je ne sais quelle étrangeté la sensation d’un souvenir lointain, sans image. J’en ai rêvé la nuit suivante et le rêve a pris la forme d’un désir d’écriture, à la fois neuf et revenu de loin (frais et chaud). Un désir de poème à retenir à tout prix. Des mots comme des bouées écrits sur la première surface venue. Était-ce un portail, une porte ? Puis je me revois cherchant un carnet chez un buraliste. 




6.06.2023

Démarrer lentement

 

Lundi 5 juin

Démarrer lentement, comme un lundi, après avoir enseigné tout le samedi à Paris. Un dernier atelier d’écriture au Musée d'Art Moderne pour ouvrir un espace de rencontre entre les œuvres et le texte, et toujours le même plaisir à cet accompagnement avec les étudiantes. Je le sens plus vivement chaque fois que cela se termine. Encore quelques mémoires à lire, quelques soutenances, des choses qui s'étaleront dans l'été, sans salaire. Ce que c’est qu’être sur les bords, de vacations en petits contrats, sur le bord de trouver un accord avec l’université. Démarrer lentement, comme un lundi, avec l'écoute des enregistrements de Paysage augmenté — la lecture accompagnée de la musique électroacoustique de Michel Bertier, nos répétitions pour le festival des poésies contemporaines "Et Dire Et Ouïssance", à Brocéliande, dans quelques semaines. Démarrer lentement malgré le printemps qui s’infiltre, malgré la beauté au dehors, les rosiers au jardin, machines à fabriquer du rose, la mer fraiche, la saison des baignades ... Ici il faut des points de suspension car il y a trop à regarder, trop à faire, la vie toujours intense propose, comment dès lors isoler, choisir, comment refuser ?